Jacob obtient la bénédiction de son père en présence de Rebecca; MICHIEL ; 1332 enluminure sur vélin; manuscrit "Den Haag, MMW, 10 B 21" ; Bibliothèque royale , La Haye
La Bénédiction de Jacob
Comprendre la Scène
On peut voir sur cette image
Le vieil Isaac va mourir, il veut bénir son fils aîné, Esaü, mais c'est le cadet, Jacob, le fils préféré de sa mère, qui se substitue à lui, et trompe son père aveugle. Isaac est vieux et malade, donc alité mais aussi aveugle, c'est donc par le toucher qu'il doit reconnaître son aîné. De sa main droite il bénit son fils.
Jacob voulant se faire passer pour son frère Esaü, a mis une peau sur son bras (ou enfilé un gant), pour imiter le bras velu de son aîné. Son père croit le reconnaître en le touchant. Rebecca la mère de Jacob et d'Esaü, a tout organisé, elle surveille la scène et pousse son fils chéri.
... Et sur d'autres images
Esaü est évidemment absent mais son retour est menaçant, c'est pourquoi on le représente parfois arrivant au loin, revenant de la chasse, le gibier sur l'épaule. La scène se passe dans la chambre d'Isaac, dont le décor varie avec les siècles, mais on voit très souvent le plat de gibier que Jacob a apporté à son père.
La représentation peut mettre l'accent
- soit sur la reconnaissance en montrant Isaac tâtant le bras de Jacob,
- soit sur la bénédiction en montrant Isaac levant la main sur son fils.
Ne pas confondre avec
La Bénédiction de Manassé et Ephraïm par Jacob Il ne faut pas confondre la bénédiction de Jacob par Isaac avec celle qui se passe à la génération suivante. Cette fois c'est Jacob qui est vieux et aveugle et il est appelé à bénir ses petits fils, Manassé et Ephraïm, les enfants de son fils Joseph . Alors que ce dernier, lui présente l'aîné, Manassé, Jacob choisit le cadet, Ephraïm. Pour intervertir sa bénédiction, Isaac croise souvent les mains au dessus de la tête des enfants
Voir Genèse ch.48, 13-22
Connaître le récit biblique
Livre de la Genèse ch. 27 versets 1 à 45
Isaac et sa femme Rebecca ont eu des fils jumeaux : Esaü qui est l'aîné, et Jacob, le cadet. Leur rivalité est constante et alors qu'Isaac préfère Esaü, Rebecca préfère Jacob. Un jour Ésaü cède son droit d'aînesse à son frère, contre un plat de lentilles. Mais il manque encore à Jacob la bénédiction de son père.
Le vieil Isaac est devenu presque aveugle. Avant de mourir il veut bénir son fils aîné et lui demande d'aller tuer du gibier et de lui préparer un plat de viande. Mais Rebecca décide de substituer Jacob à Esaü.
"Avec la peau des chevreaux elle couvrit les bras et la partie lisse du cou. ... Jacob alla auprès de son père et dit : "Mon père !" Celui-ci répondit : "Oui ! Qui es-tu, mon fils ?" Jacob dit à son père : "Je suis Ésaü, ton premier-né, j'ai fait ce que tu m'as commandé. Lève-toi, je te prie, assieds-toi et mange de ma chasse, afin que ton âme me bénisse." Isaac dit à Jacob : "Approche toi donc, que je te tâte, mon fils, pour savoir si, oui ou non, tu es mon fils Ésaü." Jacob s'approcha de son père Isaac, qui le tâta et dit : "La voix est celle de Jacob, mais les bras sont ceux d'Ésaü !" Il ne le reconnut pas car ses bras étaient velus comme ceux d'Ésaü son frère, et il le bénit."
Quand Esaü revient de la chasse la supercherie est découverte mais les bénédictions sont irrévocables.
Signification
Le couple Jacob- Esaü est celui des frères ennemis qui réapparaît à chaque moment de l'histoire juive. Jacob dont le nom signifie « que Dieu protège /qui supplante » appelé ensuite Israël, c'est-à-dire « fort contre Dieu » désigne le véritable aïeul du peuple juif (voir Le combat de Jacob) alors qu'Esaü dont le nom signifie le velu, représente tous les défauts humains
Jacob est l'homme de la ruse, mais son habileté ne servirait à rien s'il n'était surtout celui que Dieu a préféré à Esaü, celui à qui Dieu renouvelle les promesses faites à son grand-père Abraham
Voir d'autres images voisines
Rebecca joue toujours un rôle dans la scène, elle pousse le jeune Jacob, pour que son père le reconnaisse en lui tâtant le bras, ou insiste pour qu'il le bénisse. |
Jacob reçoit la bénédiction d'Isaac; Joseph RIBEIRA; 1637huile sur toile, Musée du Prado, Madrid |
Isaac bénissant Jacob; Govert FLINCK ; 1639 huile sur toile; Rijksmuseum, Amsterdam |
Esaü est parti chasser et rapporte du gibier pour satisfaire son père qui doit le bénir. Son arrivée alors que Jacob n'est pas encore béni, devient dramatique, c'est pourquoi Rebecca devient un personnage central, faisant le lien entre les deux moments de la scène. |
Isaac bénit Jacob; Julius CAROSFELD ; 1851-60 gravure extraite de la Bible en Images |
Isaac bénit Jacob; RAPHAEL; 1518-20 fresque, Les loges de Raphaël; Palais du Vatican |
Découvrir des prolongements
La bénédiction paternelle
par la main droite, soit qu'elle se pose sur la tête de celui que l'on veut bénir, soit qu'elle se dresse au dessus de lui, est restée un signe fort toujours utilisé lors de moments solennels.
La question de la rivalité fraternelle
déjà rencontrée avec Caïn et Abel est renforcée dans le cas des jumeaux.
Les jumeaux sont souvent présentés comme des doubles que l'on peut substituer l'un à l'autre. C'est ce que fait croire Alexandre Dumas dans le Masque de fer, Louis XIV a un jumeau, une sorte de double qui peut se substituer au roi. Une autre rivalité notoire de jumeaux est celle de Romulus et Remus, le premier fonde Rome et tue son frère. Pour Esaü et Jacob les différences physiques et morales sont notoires mais cela n'empêche pas leur rivalité, et cela, dès le ventre maternel.
La question du droit d'aînesse est capitale dans les sociétés patriarcales. Le fils aîné devient le patriarche, la fille aînée doit être la première mariée... Mais dans le cas de jumeaux qui est l'aîné ? Dans la Bible c'est le premier enfant sorti du ventre maternel, alors que dans notre civilisation c'est le dernier, sous prétexte de sa conception antérieure.
La préférence d'un enfant par rapport à l'autre est-elle morale ?
Dans les récits bibliques la préférence semble fréquente : Rebecca préfère son fils cadet , Jacob, et à son tour ce dernier préfèrera son petit fils cadet Ephraïm... et pour l'emporter la ruse semble justifiée. Doit-on y voir une victoire du cadet sur l'aîné, du faible sur le fort ? ou une victoire du libre choix ? Avec Jacob la finesse l'emporte puisqu'il "échange son droit d'aînesse contre un plat de lentilles" offert à Esaü. L'expression est restée et si elle ne justifie pas la conduite de Jacob, elle ne prend pas pour autant le parti d'Esaü.